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Journal du camp de Vittel

Yitzhak Katzenelson

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Le 14 août 1942, Hannah, l’épouse d’Yitzhak Katzenelson, l’un des plus grands poètes juifs du XXe siècle, et leurs deux plus jeunes garçons sont convoyés vers Treblinka depuis le ghetto de Varsovie. Katzenelson et son fils aîné, Zvi, en réchappent et travaillent quelques mois dans un atelier allemand situé dans les décombres du ghetto. Sans illusion sur le sort réservé à sa femme et ses enfants, Katzenelson cesse alors d’écrire. 

Grâce à la Résistance juive qui cherche à le protéger, il obtient des faux papiers de l’État du Honduras qui lui permettent de quitter la Pologne. Le 22 mai 1943, Katzenelson et son fils sont envoyés au camp de Vittel, en France, un camp pour ressortissants civils de pays ennemis (essentiellement anglo-saxons) détenus
comme éventuelle monnaie d’échange.

Miné par une terrible dépression, craignant de basculer dans la folie, Katzenelson écrit quelques lignes dans son journal puis se mure dans le silence. Ce n’est qu’à la veille de l’anniversaire de la liquidation du ghetto de Varsovie, en juillet 1943, qu’il commence à véritablement tenir son Journal qui, bien qu’il ne coure que sur deux mois, constitue un document d’une rare intensité.

À l’amie de Vittel qui le presse d’écrire, il répond : « Je ne peux pas écrire. Il n’existe pas de mots pour […] décrire [ces horreurs] ; ils n’ont pas encore été créés. » Mais c’est aussi le même homme qui lui dit un autre jour : « Non ! Non ! Cela doit être écrit. Le monde entier doit savoir ce qui est arrivé. […] Tout doit être raconté. » 

Voici le témoignage d’un homme brisé qui survit dans un entre-deux de la mort et qui, dès l’automne 1943, avec une terrible prescience, avance le chiffre de six millions de Juifs assassinés.