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Je me souviens, oui, je me souviens

Marcello Mastroianni

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" A la nuit tombée, j'ai pris un train qui allait vers Bassano del Grappa. A cause des attaques aériennes, les trains roulaient toutes lumières éteintes. Je me souviens de ce train bourré de monde, les uns collés aux autres, on n'y voyait rien. A un moment, j'ai senti une présence féminine, une femme qui parlait, peut-être avec des amis, peut-être allaient-ils chercher de la nourriture, je ne sais pas. Toujours est-il que malgré le manque d'espace, moi qui ai toujours été un grand fumeur, j'ai trouvé le moyen d'allumer une cigarette ; En allumant ma cigarette, j'ai évidemment éclairé mon visage ; mais, un peu aveuglé par la flamme, je n'ai pas vu qui était devant moi. Et cette femme s'est approchée, nous nous sommes effleurés - et nous nous sommes embrassés. Ce fut une émotion fulgurante. Si mystérieuse ! [à] Que d'années ont passé depuis ! Pourtant, ce moment demeure, encore aujourd'hui, parmi les souvenirs les plus intenses de ma vie. La mémoire est bizarre, non ? "
Que reste-t-il d'une vie pour un homme de soixante-douze ans ? Par petites touches impressionnistes, Marcello Mastroianni recompose ici le paysage de sa mémoire. En de brefs chapitres qui constituent autant de pièces du puzzle de son existence, au gré de capricieuses associations d'idées, d'émotions, d'images, de rêves, de pensées, il tisse fil à fil la tapisserie d'un autoportrait. On retrouve dans ce récit le rythme de sa phrase et le grain de sa voix, son ironie et sa tendresse, son humour et sa nostalgie, sa fantaisie désinvolte et la flamme intacte de sa passion, comme cette inimitable distance au rôle qui l'a toujours prémuni contre la tentation de se prendre au sérieux.
Traduit de l'italien par Geneviève Cattan.